Rencontre du troisième âge

Deux vieux ou plus qui s’accouplent, ça choque l’opinion. Inconsciemment les gens associent vieillesse à sagesse et sexualité à reproduction. Les organisateurs de croisières ont beau lutter contre ces lieux communs, ils ne prêchent que des convaincus tels que moi. Et hélas je réalise que l’idylle grise que j’ai prévu de vous déballer ne plaide guère pour une évolution des mœurs…

Dans une maison de retraite, une vieille et un vieux se sont amourachés. Amou-arrachés, devrais-je plutôt dire, mais nous n’en sommes pas encore là. Germaine et Lucien. Leurs mains ont commencé à se toucher dans le sac de grains de maïs du loto. Très vite ils ont décidé d’aller plus loin.

Germaine est très excitée à l’idée de refaire l’amour. Elle s’en est abstenue depuis 20 ans et la mort de son mari. Or elle a lu dans un magazine pour seniors que c’est un excellent moyen de rester en bonne santé. Lucien n’est pas veuf, mais c’est pire, puisque c’est sa femme, jugeant qu’il ne parvient plus à vivre dignement, qui l’a placé en institution. Pour se venger, il a très hâte de cocufier cette mégère.

Malheureusement pour Germaine, à chaque fois qu’elle a essayé de se passer un doigt, ça lui a fait comme si un motoculteur venait se garer. Malheureusement pour Lucien, aucune des fois où il s’est penché sur la tuyauterie il n’est arrivé à bander plus dur qu’un coup de poulet.

Germaine a donc fait par correspondance l’acquisition, toujours grâce à son magazine, d’une fiole de gel intime. Lucien, par son médecin, s’est fait prescrire du viagra et au cas où ça ne marcherait pas, des injections péniennes.

C’est le grand soir. Germaine attend Lucien dans sa chambre individuelle. Elle s’est débarrassée de sa protection urinaire pour s’oindre. Dans le cas que Lucien voudrait une fellation, elle s’est fixé le dentier avec du « fixodent » extrafort. Lucien a aussi attendu le dernier moment pour s’équiper. Pour plus d’efficacité il a dissout le viagra dans le produit à s’injecter dans le zob. Sorte de pot belge ingénieux mais dangereux, on verra bientôt pourquoi. La première tentative a foiré puisque l’aiguille a tout transpercé, mais la deuxième a réussi.

Germaine est assise sur son lit. Elle accueille Lucien en souriant et son dentier tombe dans sa chemise de nuit. Confuse elle se met à le chercher, dévoilant un sein sans chercher à être sexy. Lucien, dur comme un gressin, s’amène quand même, baisse son pantalon plus bas que ses testicules, c’est-à-dire très bas, et relève la chemise de nuit de Germaine. Il marque un temps d’arrêt devant la dépilation pelvienne –ça veut dire que sa vieille chatte perd çà et là des poils- et la pénètre.

Ce n’est pas agréable pour Germaine, dont le vagin n’a pas l’élasticité espérée. C’est carrément glucose pour Lucien, qui n’arrive pas à amorcer le retrait. Il est comme un loup la patte prise au piège. Germaine recule, il avance, il recule, elle avance… Ils sont soudés l’un dans l’autre !

A la surprise des amants se mêle une terreur croissante. Soudain une aide-soignante entre, négligeant la chaussette que Lucien avait nouée à la poignée pour indiquer le besoin d’intimité.

– Dites-donc les vieux cochons, vous pourriez au moins vous interrompre quand je suis là !

Germaine veut remettre son dentier pour s’expliquer mais rien à faire, il lui glisse du bec comme le camembert de la fable. C’est Lucien qui pousse le cri d’alerte :

– On est coincés bordel de merde !

L’aide-soignante essaye de tirer Lucien mais ce n’est pas un problème de dos. D’ailleurs son collègue plus fort n’y arrive pas non plus. Soudain, en voyant sur la table de chevet, de part et d’autre du portrait du défunt mari de Germaine, qui semble se moquer, le tube de gel intime et celui de colle à dentier, ils comprennent tous simultanément… Germaine a inversé les onguents !

Le personnel rit gras, les amants rient jaune. Mais tous s’accordent à penser que la situation doit se régler. Comment ? C’est tellement collé ! L’aide-soignant, qui a fait un stage d’assistant sexuel pour les handicapés, entreprend de faire jouir Lucien par la prostate pour qu’il lubrifie de l’intérieur.

– Ce n’est pas de l’assistance sexuelle, c’est du dépannage sexuel !

Mais le joyeux drille peut enfoncer et ré-enfoncer tant qu’il veut son gros pouce d’Antillais, Lucien a le cancer de la prostate, il y a longtemps qu’elle est atrophiée.

Les deux professionnels de santé proposent d’attendre, pour voir si ça se détend. Une heure après rien n’a changé. Si ce n’est que la base du sexe de Lucien est bleue. Un docteur est appelé, qui arrive deux heures plus tard. Lucien a la queue noire. Son sexe est mort, littéralement mort. Lui vit mais son sexe est mort ; sa rigidité n’était que cadavérique, peut-être depuis l’injection. Le docteur l’ampute sans sommation. Et comme Germaine avait été très généreuse en « gel intime », il faut également lui couper les roubignolles car la peau en est collée aux rides vaginales.

Lui qui urinait déjà au moyen d’une sonde, ça ne lui changera pas beaucoup la vie, se dit-on. Mais que faire pour Germaine ? Va-t-elle demeurer à jamais enconnée par le vit de Lucien moisissant en elle comme un rat crevé dans un coin de cave ? Oui, car nul espoir d’extraction n’est permis, tant les tissus des deux sexes sont mêlés.

Le lendemain dimanche, la famille de Lucien vient le visiter. Sa femme est là, avec enfants et petits-enfants, pour fêter leurs noces de platine. Elle lui remet une médaille de ce métal symbolisant la pureté de leur amour ; lui, muet, gaga, lui remet un sachet plastique malodorant avec ses couilles dedans. Le dimanche suivant Germaine meurt de septicémie.

fixodent
 

 

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