La mamelle de Proust

Comment les orphelins vivent-ils leur complexe d’Œdipe ? Un de mes patients –nommé Alain par l’administration car il est né sous X le jour de la Saint Alain- en chie un peu de ce côté. Sur le plan professionnel, il est en revanche tout à fait accompli. Il a créé une marque de mousse nettoyante pour clavier d’ordinateur qui fait un tabac.

Ces bons résultats, il avait décidé de les fêter avec son adjoint, un petit gros qui lui cirait les pompes. L’endroit se prêtait à la bamboula, car ils étaient dans une station balnéaire où ils draguaient un gros client : un centre de dactylographie pour migrants lépreux. Or après s’être copieusement pinté la gueule, ils croisèrent une pute à deux sous qui claudiquait…

-On se la fait, chef ! Je vous l’offre.

-Z’êtes malade, Durand, j’suis pas bourré à ce point !

-Non mais on se la fait pas vraiment, patron. On lui demande juste un truc dégueu pour rigoler, comme de se faire lécher le fion ! C’est pour de rire, vous tromperiez pas madame en faisant ça.

L’adjoint avait senti que son patron pouvait accepter. Il était dans un de ses moments de flou qui lui venaient toujours lorsque le Centre National de l’Accès aux Origines Personnelles lui avait annoncé que ses démarches pour retrouver ses géniteurs avaient fait chou blanc.

Voilà donc nos deux larrons se faisant lécher le hublot pour 10 euros chacun derrière les poubelles d’un restaurant.

-Aaaaaaaah c’est trop bien, chef !

La jouissance de l’adjoint au cours de cet acte bucco-anal s’expliquait par sa joie de se faire lécher le cul au sens propre, lui qui était un lèche-cul au sens figuré ; pas besoin d’avoir fait psycho pour le comprendre.

Alors que la vieille pute léchait le cul d’Alain à quatre pattes, l’adjoint, jamais avare de facéties, passa sous elle et lui mordilla un sein tombant. Il appela son boss :

-Hé Romulus ! Venez téter !

Un instant il eut peur d’avoir été offensant avec cette blague sur les deux orphelins de la mythologie romaine, eu égard à la problématique d’adoption d’Alain. Mais celui-ci, ivre, sourit :

-J’arrive, Rémus !

Tel un garagiste se glissant sous une automobile, il se positionna sous le poitrail avachi de la putain, coude à coude avec son adjoint.

Et tout d’un coup, le souvenir lui apparut. Un winner comme lui en avait déjà embouché du nibard. Jamais ça ne lui avait provoqué un tel flashback. Etait-ce le maquillage au bout des vieux seins en charpie de la pute qui lui donnait cette hallucination ? Toujours fut-il que toutes les sensations qu’il éprouvait convergeaient vers une image de lui bébé tétant ce même sein, dans des circonstances très différentes d’amour, de paix, de maternité. Bien plus forte que tous les actes de naissance qu’aurait pu lui fournir le Bureau de l’Adoption, cette sensation d’avoir retrouvé sa mère et de la téter à nouveau était confondante. A tel point que pour Alain, il n’y avait que deux possibilités : cette guenille était ou bien sa mère biologique, ou bien elle avait été sa nourrice.

L’adjoint avait remarqué le trouble de son chef. Il lui en demanda la cause. Alain alla au cul de la pute et la déculotta.

-Qu’est-ce qui vous prend, chef, déconnez pas faut pas baiser ça !

Il attrapa son adjoint par la mâchoire.

-« ça », c’est sûrement ma mère, tu vois ! Je vérifie si elle a pas la même tâche de naissance que moi au coin de l’anus.

Il écarta les vieilles meules plissées mais elle avait les abords du fion constellés de merde. Le client d’avant dut la ramoner serré. De plus la spécialité locale était la tielle. Il demanda son mouchoir en tissu à son adjoint pour l’essuyer ; il fallut presque qu’il le lui arrachât de la poche. Finalement, Alain eut un haut le cœur au moment de la torcher.

-L’ADN ! S’exclama-t-il en s’essuyant la bouche après un moment de réflexion. La reine des preuves ! Il faut que je prélève de son ADN.

Alain voulut arracher délicatement un cheveu à cette prostituée, mais toute une moumoute partit, les cheveux naturels restant plaqués au crâne sous du cellophane.

-Pardon, maman ! blêmit Alain. Jean-Philippe ! (c’était le prénom de l’adjoint) rendez-moi service : pénétrez-là avec cette capote et après je ferai comparer l’ADN de sa mouille avec le mien, vite !

Que son patron puisse être le fils d’une pute de caniveau, ça le rendait moins impressionnant aux yeux d’adjoint de Jean-Philippe. Il lui refusa ce service et ne plia pas devant le regard noir.

-Bon. Alors je me débrouillerai. Rentrez à l’hôtel et mettez-vous dès maintenant à la pro forma pour le parc informatique des lépreux. Exécution !

Alain allait lui-même prélever l’échantillon. Il s’équipa à grand-peine d’un préservatif car il bandait fort peu. Le sexe de sa mère à genoux béait devant lui, distordu. Pour se donner du courage, il hurla la demande qu’il avait tout au long de sa vie détesté et redouté qu’on lui formulât : « NOM-DATE-ET-LIEU-DE-NAISSANCE ! »

Juste un aller-retour. Très bref.

-Je te préviens que c’est le même tarif, lut-il dans les yeux de sa mère, qui étaient comme les roulettes des énormes valises qu’elle avait dessous. La capote resta un peu entre eux deux, étirée du fait qu’Alain avait perdu toute son érection. Puis elle ne pendit plus que du sexe maternel. Il l’en retira avec l’image de son cordon ombilical. Elle était glaireuse et pleine de poils pubiens. On aurait dit une bande d’épilation.

Pour faire un test ADN, d’aucuns présentent un coton tige avec un peu de salive dessus. Alain lui, ce serait un préservatif très usagé, bien qu’il n’avait servi que pour un furtif aller-retour. Il imagina le grotesque de la situation de se présenter avec cela dans un laboratoire pour un test de maternité. Il dessoulait. Et si on lui disait qu’il y avait plein d’autre traces d’ADN, celles des clients précédents, qui tous ne se protégeaient peut-être pas ? Et si ce n’était pas sa mère, et si c’était sa mère…

Cette femme avait en tête des préoccupations plus matérielles. Elle faisait signe qu’elle voulait son fric. L’échange de regards fut intense ; puis elle s’attendrit, dévoilant une dentition ravagée, lorsqu’Alain lui donna toute sa monnaie. Il n’avait plus sur lui que cette capote immonde. Il la jeta.

De retour à l’hôtel, son adjoint se réveillait mais l’accueillit avec morgue.

-Alors, on a quitté les jupons de maman ?

-Ecrasez. Il a avancé le business plan pour les lépreux ?

-Oh ça va, calmos, grand chef.

-Magnez-vous de me pondre un truc, p’tite merde ! J’ai le sentiment qu’avec l’épidémie de lèpre qu’il y a dans ce bled, on va faire fortune avec notre mousse nettoyante pour clavier d’ord…

Sur ce ils se regardèrent, et cédant à une même panique, coururent se frictionner la bouche et l’anus avec leur mousse à la con !

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